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Interview de SASCHA réalisée par PREMONITION en Octobre 2003 :


Bien qu'en pleine préparation de l'imminente tournée de KMFDM, c'est avec décontraction que Sascha Konietzko a bien voulu répondre à nos questions concernant le nouvel album du groupe, "WWIII", et nous parler de ses projets.

Premonition : À propos du morceau WWIII qui ouvre l'album, n'as-tu pas peur d'être perçu comme un groupe militant pour le gouvernement Bush (notamment avec le sample du discours de G.W. Bush) et d'être mal interprété comme ont pu l'être Front 242 en 1984 avec leur morceau Funkahdafi ?

Sascha : Je me souviens de Funkadhafi, mais les premiers mots sont "Je déclare la guerre au monde (I declare a war on the world)", ce n'était donc pas une guerre uniquement dirigée contre les USA. Ceci dit, j'emmerde Georges W. Bush.

Premonition : Tu as pu utiliser le sample de son discours sans problème ?

Sascha : Puisque c'est un personnage public, c'est du domaine public. Mais de toute façon je m'en fous.

Premonition : Si tu pouvais le rencontrer, lui dirais-tu que tu as mis son CV sur votre site internet ?

Sascha : Je lui dirais d'aller se faire voir et de dégager !

Premonition : L'intro du morceau WWIII est assez atypique, avec le banjo, le rocking-chair, tous ces clichés américains mis en musique. Comment vous est venue cette idée ?

Sascha : Nous tenions à ouvrir l'album avec ce titre, mais nous voulions aller à contre-courant du contenu du morceau lui-même qui n'est pas drôle du tout. Alors nous avons essayé d'utiliser quelque chose de visuel, pour créer un contraste avec les propos du morceau, d'où l'ambiance un peu country, le banjo, etc…

Premonition : Le morceau BlackBall sonne un peu comme du Front Line Assembly période "Hard Wired". Est-ce que le fait d'habiter Seattle (pas si loin que ça de Vancouver) t'as permis de rencontrer Bill Leeb ?

Sascha : Pour tout te dire, la dernière fois que j'ai entendu parler de FLA, c'était en 1989 et je ne prête pas beaucoup d'attention à ce qu'ils font.

Premonition : Tu ne l'as donc jamais rencontré ?

Sascha : C'est vrai que nos deux villes ne sont pas très éloignées, mais il y a une frontière qui les sépare, et les Américains et les Canadiens ne s'apprécient pas beaucoup. Traverser cette frontière m'est presque impossible. Ils m'ont déjà renvoyé trois fois ! Et de toute manière, Vancouver est une ville assez artificielle.

Premonition : Tu aimes vivre à Seattle ?

Sascha : Oui, Seattle est cool. J'aime le temps qu'il y fait, les montagnes et l'océan. Et il y a beaucoup d'activités à pratiquer ici.

Premonition : Tu n'es donc pas constamment enfermé en studio ?

Sascha : Nous avons travaillé sur ce nouvel album pendant 10 mois, de septembre 2002 à juillet 2003, et lorsque nous l'avons terminé, nous avons immédiatement pris des vacances. Nous avons fait du speed-balling, du ski nautique... Après 10 mois de travail sur un disque, il faut bien s'amuser un peu !

Premonition : Sur l'album avec les symboles dans le titre (baptisé "Symbols" par les fans) sorti en 1997, il y a ce morceau Torture chanté par Nivek Ogre de Skinny Puppy. Es-tu toujours en contact avec lui, et as-tu écouté son dernier album solo ?

Sascha : À part peut-être les titres Megalomaniac ou Waste, je n'ai jamais vraiment aimé cet album. Pour ce qui est de Ogre, je suis très très rarement en contact avec lui, car il est très occupé avec sa carrière solo et la préparation du prochain album de Skinny Puppy. J'ai effectivement écouté "SunnyPsyOp", mais je préférais "Welt".

Premonition : Le nouvel album de KMFDM sonne très live, bien que vous utilisiez beaucoup de machines. Comment arrivez-vous à un tel résultat ?

Sascha : En fait nous avons commencé par enregistrer comme si nous étions un groupe de rock, avec les parties de batteries, de guitares, et ensuite nous y avons intégré les machines. Alors que dans le passé, nous commencions toujours par les machines, puis nous intégrions ensuite l'élément humain. Cette fois-ci, ce sont vraiment des techniques d'enregistrement rock.

Premonition : Il y a un mélange de tension et de colère dans ta façon de chanter. Est-ce comme une thérapie, une façon de ne pas être tout le temps déprimé ni dégoûté du pays dans lequel tu vis ?

Sascha : Il m'arrive effectivement parfois d'être vraiment dégoûté et déprimé au sujet des USA. Mais je suis européen, et donc si je n'aime plus vivre ici, je peux toujours rentrer en Europe. Je ne suis pas coincé dans ce pays et j'en suis heureux.

Premonition : Te sens–tu libre aux USA ?

Sascha : Je me sens libre partout. Tu sais, j'ai 42 ans, je dis ce que je pense et je n'ai pas peur. Je me sens vraiment libre partout où je vais.

Premonition : Dans le groupe, tout le monde semble impliqué de son côté dans un projet solo. Comment écrivez-vous les chansons de KMFDM ?

Sascha : Dans le passé, je lançais le processus en commençant à écrire, puis je passais les chansons aux autres, je les envoyais à l'époque à Londres, NYC, etc. Cette fois-ci, Joolz (le guitariste), Andy (le batteur), Lucia et moi-même vivons tous à Seattle. C'est donc nous quatre qui avons fait le gros du travail. Raymond est venu de Londres une ou deux semaines. Les crédits sur cet album sont pour nous quatre, il n'y a pas de compositeur principal.

Premonition : Et au sujet de l'album de MDFMK, pouvons-nous aussi parler de side-project ?

Sascha : Je pense que c'était un disque à part, une sorte de hors série. C'était un moyen de franchir un cap, à ce moment-là KMFDM avait besoin de se reposer pour mieux se retrouver.

Premonition : Tu as pourtant déclaré qu'il pourrait y avoir un deuxième album de MDFMK.

Sascha : Tu ne peux jamais dire que ça n'arrivera jamais plus, alors qui sait ? Ce n'était de toute manière pas si différent, si ce n'est que nous étions juste à trois.

Premonition : Il était quand même plus orienté drum'n'bass, non ?

Sascha : Oui, effectivement c'était vraiment drum'n'bass. C'était une manière de se détacher de notre côté rock.

Premonition : J'aimerais que tu me parles des pochettes que réalise Brute!. Penses-tu qu'elles ont contribué au succès de KMFDM ?

Sascha : Je suis sûr que son travail nous donne une image reconnaissable, une identité, comme n'importe quelle marque en a besoin. En ce qui concerne le contenu des images, il m'arrive parfois d'être aussi perplexe que n'importe qui. Qu'est-ce qu'il essaye de nous dire ici (rires) ? Tu sais, Brute! est un membre indépendant de KMFDM et son travail est aussi important que le sont les paroles ou la guitare, autant que la contribution de chacun. Ça fait partie d'un tout. Il fait des images fortes. Je l'appelle une fois par an et je lui dit "OK, le prochain album s'appelle "WWIII" et j'ai besoin de deux ou trois planches, vois ce que tu peux faire". C'est donc lui qui est arrivé avec l'idée du grand soldat, du pétrole qui brûle, du bébé mort et de la mère qui pleure. Je pense que si je le voulais je pourrais avoir un peu de contrôle là-dessus, que je pourrais lui dire "Fais comme ci, fais comme ça", mais je ne le fais pas. Je lui dis juste "Ceci est le titre, inspire-t'en".

Premonition : La tournée américaine qui arrive ressemble à un vrai marathon avec 36 concerts en 5 semaines...

Sascha : Oui c'est un peu ça (rires) ! Nous sommes en répétition en ce moment. En fait, nous avons commencé hier, c'est pour ça que ma voix est un peu (il prend une voix grave et plaintive) "Weeeuuuuu weeeeeuuuuu". Les garçons, Joolz, Andy et Bill y travaillent déjà depuis deux semaines, et Raymond nous rejoint aujourd'hui, nous allons donc répéter avec lui ce soir. Et la tournée commence dans deux semaines. Croisons les doigts..

Premonition : Pouvons-nous espérer voir KMFDM en Europe ?

Sascha : Absolument, nous arrivons en Europe au printemps et passerons certainement par Paris.

Premonition : Votre musique, à l'instar de celle de Ministry, est très excessive, très puissante. On ne se repose pas un seul instant. D'où vous vient toute cette énergie ?

Sascha : Je ne sais pas, il y a beaucoup de colère, d'ironie, de sarcasme... Mais il y a beaucoup de fun aussi.

Premonition : Il ne pourrait pas y avoir de chansons d'amour sur un album de KMFDM ?

Sascha : (Rires) Non.

Premonition : Au sujet du sample "The constant realization of dominants results in fear" qui ouvre le morceau Last Things. Quelle en est l'idée ?

Sascha : JSi tu te sens constamment supervisé ou soumis par une force supérieure, alors tu as peur. C'est un commentaire social ou politique. Cette chanson a tout d'abord été écrite par Joolz et Lucia. Lucia écrit des paroles différentes des miennes ou de celles de Raymond, nous sommes trois personnages vraiment différents. En gros, la règle est que nous écrivons chacun ce que nous pensons, et nous ne synchronisons pas nos propos, nous ne l'avons jamais fait. Nous mettons tout en commun, c'est un mélange... Cela fonctionne depuis 20 ans de manière très variée, c'est une des choses les plus intéressantes dans KMFDM et je pense que c'est aussi ce qui fait que ce projet est toujours en vie, énergique et nouveau à chaque fois. Chaque disque est comme un nouveau chapitre dans un album de photos. Tu sais, pour nous, chaque disque pris individuellement n'est pas vraiment important, ce n'est jamais l'album ultime. Mais dès qu'un nouveau sort, tout prend un nouveau rôle, en arrière-plan, et aide à la compréhension de notre carrière. Ce n'est pas un succès commercial, mais c'est un succès en termes de phénomène de pensée.

Premonition : Ce n'est jamais un succès commercial ?

Sascha : Pas vraiment. Nous n'avons pas à travailler comme serveurs ni rien, mais aucun de nous n'est riche. Nous nous en sortons, c'est tout.

Premonition : Tu as déclaré sur ton site Internet que MTV est une insulte au monde ! Pourtant des groupes comme Nine Inch Nails y sont diffusés. Qu'en penses-tu ?.

Sascha : C'était le cas dans le passé, maintenant MTV suit plus les groupes. Mais bon, qui suis-je pour en parler, je ne regarde même pas la télé ! Je n'ai d'ailleurs pas de poste à la maison. Si je veux regarder quelque chose, j'ai un ordinateur et un lecteur de DVD. Je n'ai pas besoin de télé, c'est si ennuyeux.

Premonition : Et tu surfes sur Internet ?

Sascha : Bien sûr.

Premonition : Est-ce que tu t'impliques personnellement sur le site de KMFDM ?

Sascha : J'écris le contenu mais je ne fais pas le travail de webmaster. Je ne passe pas mes journées derrière l'ordinateur, je fais de la musique, et ça occupe la plupart de mon temps.

Premonition : Tu trouves néanmoins le temps de produire ou remixer d'autres artistes (Front 242, Treponem Pal, Peter Murphy). Est-ce quelque chose que tu aimes faire et que tu referas ?

Sascha : Cela fait un moment maintenant que je n'ai pas travaillé sur de la production hors-KMFDM. Et jusqu'à hier je travaillais sur la musique du jeu "Spiderman 2".

Premonition : Va-t-il y avoir un DVD live de la future tournée ?

Sascha : Oui. Nous allons la filmer et nous allons faire un autre DVD, comme nous l'avions fait pour la précédente tournée. Ça nous avait amusé de faire ce DVD après coup, et nous voulons vraiment en faire un autre. C'est cool de documenter une tournée. Il sortira en 2004 sur Sanctuary Records. Nous avons quitté Metropolis et nous sommes maintenant sur Sanctuary car nous voulions être sur un label qui a une réelle présence en Europe. Je pense que c'est très important pour KMFDM de se concentrer sur un possible retour en Europe.

Premonition : Vraiment ? Tu y penses ?

Sascha : J'y pense beaucoup en ce moment. Je pense revenir vivre en Europe. C'est en train de devenir vraiment bizarre ici, aux USA.

Premonition : Le business de la musique a-t-il changé depuis vos débuts ?

Sascha : Quand j'étais jeune, je n'y connaissais pas grand chose. C'était plutôt "peu importe". Nous sommes venus en Amérique après nous être démenés sans réussir pendant environ six années en Allemagne. Et quand nous sommes arrivés ici nous nous sommes dit : "Waouh, les gens achètent KMFDM !".

Premonition : Et maintenant, les gens achètent vos albums en Europe ?

Sascha : Je ne pense pas vraiment en termes de ventes. Je dois plutôt penser "Qu'aimerais-je faire?" et "Où aimerais-je être ?". Les ventes sont secondaires. Tu vois, nous ne sommes pas dans le business de la vente de musique, mais dans celui de faire de la musique, et c'est une bonne chose. Tout ce music business américain existe sur une planète qui n'est vraiment pas la mienne.

Premonition : Est-ce pour cela que tu as choisi Seattle ?

Sascha : Oui ! C'est aussi pour ça que je ne vis pas à Los Angeles. J'aime rester dans mon petit monde et faire les choses comme KMFDM les aime. Tu sais, nous n'avons pas besoin d'être en contact avec l'industrie du disque. Et heureusement, il n'y en a presque aucune trace ici à Seattle. Nous sommes libres de faire ce que nous voulons, et ça nous va.